Don d’organes en France : fonctionnement, chiffres, encadrement

En France, la législation sur le don d’organes repose sur un principe de consentement présumé, inscrit dans un cadre juridique évolutif. Il vise à concilier efficacité médicale et respect des choix individuels.
Après une baisse marquée des greffes en 2020 due à la crise sanitaire (-25 %), un plan national 2022-2026 a été lancé pour relancer le prélèvement et la transplantation d’organes et de tissus.
Mais qui peut donner ? Faut-il s’inscrire quelque part ? Et comment s’exprime un refus ?
Loi Caillavet et consentement présumé
Le cadre juridique
C’est en 1976, avec la loi Caillavet, que la France adopte pour la première fois le principe du consentement présumé : toute personne est supposée favorable au don de ses organes après sa mort, sauf si elle a clairement manifesté son opposition de son vivant.
Cette approche, qui fait de la France un des premiers pays européens à poser ce principe, visait déjà à répondre à la pénurie chronique d’organes à greffer.
Mais les contours de cette loi ont souvent été méconnus, mal appliqués, ou contournés par les réticences familiales. Pour remédier à ces limites, la loi de modernisation de notre système de santé de 2016 est venue renforcer et préciser ce cadre, avec une application dès le 1er janvier 2017. Elle a clarifié les modalités d’expression du refus et a insisté sur la nécessité de dialogue entre les citoyens et leurs proches.
Aujourd’hui, bien que le principe du consentement présumé reste au cœur du dispositif, la sensibilisation et l’information du public demeurent indispensables. Car si la loi facilite le prélèvement, la réalité est que les familles sont encore consultées dans la majorité des cas, et que la méconnaissance du sujet peut entraîner des refus par défaut.
Dans cet article, nous vous proposons de mieux comprendre les lois encadrant le don d’organes en France, leurs évolutions, et leurs implications concrètes pour chaque citoyen.
Quels organes et qui peut faire un don ?
Le don peut concerner différents types d’organes :
- reins,
- cœur,
- foie,
- poumons,
- pancréas,
- mais aussi des tissus comme la peau,
- les os
- ou les cornées.
Après le décès, le prélèvement est possible sous certaines conditions médicales strictes, notamment un décès en milieu hospitalier avec une prise en charge adaptée.
Du vivant du donneur, la législation française autorise le don de rein et d’une partie du foie, à destination d’un proche (famille ou personne ayant une relation affective étroite). Cela nécessite une autorisation du comité d’experts, ainsi qu’une évaluation psychologique et médicale approfondie.
La loi Caillavet : un cadre renforcé
Depuis la loi Caillavet, la France repose sur un fondement simple mais essentiel : “tout citoyen est considéré donneur d’organes par défaut, sauf s’il a exprimé son refus”. Ce principe vise à maximiser les chances de greffe, tout en laissant à chacun la liberté de ne pas participer.
Avec l'entrée en vigueur de la loi de santé de 2016, le cadre s’est renforcé et le refus peut être exprimé de trois façons :
- en ligne, via le registre national des refus ;
- par écrit, daté et signé, confié à ses proches ;
- verbalement, auprès de proches, qui devront en témoigner.
L’objectif est de clarifier les volontés individuelles et de limiter les incertitudes au moment du décès. En effet, en l’absence d’un refus exprimé, le prélèvement peut avoir lieu, même si les proches sont opposés. Toutefois, dans les faits, les équipes médicales dialoguent toujours avec les familles pour s’assurer d’un respect des volontés du défunt.
Don d’organes pour les majeurs et les mineurs : quelles règles établies ?
Le consentement au don d'organes est présumé, cela signifie que si vous n'avez pas fait connaître votre refus de votre vivant, on considère que vous êtes d'accord pour que vos organes soient prélevés lors de votre décès. Avant tout prélèvement, il est donc procédé à la recherche d'informations pour savoir si vous avez émis un désaccord.
Lorsque la personne décédée est un mineur, le prélèvement ne peut avoir lieu qu'à la condition que chacune des personnes investies de l'exercice de l'autorité parentale (par exemple : parents, tuteurs) donne son accord par écrit. S'il n'est pas possible de consulter l'un des parents, le prélèvement peut avoir lieu à condition que l'autre parent donne son accord par écrit.
À noter qu’à partir de 13 ans, un mineur souhaitant s'opposer au prélèvement de ses organes peut s'inscrire au registre national des refus.
Un enjeu de santé publique
Les dernières données publiées au 1er janvier 2024 révèlent les chiffres suivants :
- 21 866 patients étaient inscrits en attente d’une greffe d’organe, dont 11 422 figuraient sur la liste d’attente active, c’est-à-dire immédiatement éligible à une greffe.
- L’activité de prélèvement de tissus (cornées, artères, veines, peau, valves cardiaques, os) a connu une hausse de 11,5 % par rapport à l’année précédente.
- En revanche, le taux d’opposition aux prélèvements sur des patients décédés en état de mort encéphalique a enregistré une augmentation de 9,4 %.
Malgré ces évolutions, le niveau global de greffes observé en 2019 n’a pas encore été totalement retrouvé, à l’exception notable des greffes réalisées à partir de donneurs vivants, notamment pour le rein et le foie.
Priorités stratégiques de l’Agence de la biomédecine pour 2024
Pour renforcer la dynamique de dons et répondre plus efficacement aux besoins, l’Agence de la biomédecine a défini trois grandes priorités depuis 2024 :
- Faire du prélèvement et de la greffe une priorité nationale, mobilisant l’ensemble des acteurs de la chaîne de soins.
- Déployer massivement la greffe rénale à partir de donneurs vivants, dont le potentiel reste sous-exploité en France.
- Renforcer l’implication des directions de CHU et des commissions médicales d’établissement dans la mise en œuvre des actions de prélèvement.
Un enjeu vital toujours d’actualité
En 2023, environ 6 500 greffes ont été réalisées en France. Toutefois, plus de 20 000 patients demeurent en attente d’une greffe vitale. Ce déséquilibre illustre à quel point le don d’organes reste un levier crucial de santé publique, indispensable pour améliorer la survie et la qualité de vie de milliers de personnes.
Le système français repose sur un principe fort : celui du consentement présumé, qui fait de chaque citoyen un donneur potentiel après son décès, sauf refus exprimé.
Ce modèle incarne un équilibre entre solidarité nationale et respect des choix individuels, et permet d’alimenter une chaîne humaine précieuse, souvent salvatrice.
Sources :
- Don d'organes - Site officiel
- Service Public - Don d'organe : prélèvement lors du décès
- Agence de la biomédecine - Don et greffe d'organes
- Agence de la biomédecine - Registre national des refus
- Légi France - LOI n° 2016-41 du 26 janvier 2016 de modernisation de notre système de santé (1)
- Agence de la biomédecine - ACTIVITÉ DE PRÉLÈVEMENT ET DE GREFFE D’ORGANES EN 2023 et baromètre d’opinion 2024
- Vie Publique - Greffes d'organes : en augmentation en 2023 malgré un fort taux d'opposition
- Santé Gouv - Greffes et dons d’organes : plans d’actions 2022-2026
- AMELI - Le 22 juin, une journée pour parler du don d’organes