Suicide chez les hommes : un enjeu de santé publique en France
Avec près de 9 000 décès par an en France, le suicide constitue une cause majeure de mortalité évitable. Le suicide demeure un enjeu majeur de santé publique, touchant chaque année des milliers de personnes en France et en Europe. Mais derrière les chiffres globaux, une réalité interpelle : les hommes sont significativement plus touchés que les femmes.
Ce constat, observé depuis plusieurs décennies, met en lumière des différences profondes en matière de santé mentale et de rapport à la demande d’aide.
Pourquoi les hommes sont-ils plus vulnérables ? Quelles différences se cachent derrière les statistiques ?
La France : un écart hommes-femmes marquant
En France, les dernières données montrent que les hommes présentent un taux de mortalité par suicide bien plus élevé que celui des femmes. En effet, en 2021, près de 8 900 décès par suicide ont été recensés dans l’Hexagone et les DROM TOM (correspondant à un taux standardisé de 13 pour 100 000 habitants).
Il s’agit principalement des hommes de 45 ans et plus qui présentent les taux les plus élevés : le taux parmi les 65 ans et plus atteint environ 39 pour 100 000 et parmi les 45-64 ans près de 30 pour 100 000.

Selon l’Insee, le taux standardisé de décès par suicide chez les femmes s’élève à environ 6 à 7 pour 100 000. Ce chiffre masque toutefois d’importantes disparités selon l’âge : les femmes âgées de 45 à 64 ans présentent les taux les plus élevés, atteignant environ 9,7 décès pour 100 000, tandis que les jeunes femmes de moins de 25 ans, historiquement moins concernées, connaissent une hausse préoccupante leur taux étant passé de 1,15 à 1,6 décès pour 100 000 entre 2020 et 2022.
Par ailleurs, la France affiche un taux de suicide global de 13,3 décès pour 100 000 habitants en 2022, ce qui la place au-dessus de la moyenne européenne (≈10,2 pour 100 000). Cette sur-représentation masculine impose de s’interroger : quelles sont les causes ? Comment agir ?
En Europe : un schéma similaire
À l’échelle de l’Union européenne, l’écart entre hommes et femmes reste tout aussi élevé. Selon l’Eurostat, les hommes représentaient environ 76,7 % des décès par suicide dans l’UE.
Une amélioration a été remarquée ces 10 dernières années avec une diminution de 13% des taux de suicide chez les hommes. Mais malgré cette amélioration, la tendance de fond (un taux beaucoup plus élevé chez les hommes) reste inchangée. Pourquoi les hommes sont-ils davantage concernés ?
Plusieurs facteurs se combinent pour expliquer ce déséquilibre de genre :
- Les hommes utilisent plus fréquemment des méthodes à plus forte létalité, ce qui augmente le risque de décès après tentative ;
- Les normes sociales et culturelles peuvent inciter les hommes à moins exprimer leur souffrance, à retarder le recours aux soins psychologiques ou à privilégier des comportements à risque, ce qui limite les interventions précoces ;
- Les périodes de la vie comme la perte d’emploi, la retraite, le deuil ou l’entrée en institution peuvent particulièrement affecter les hommes âgés, ce qui explique un taux très élevé dans les classes d’âge avancé. En France, on observe que parmi les plus de 85 ans, le taux atteint jusqu’à 86 pour 100 000 chez les hommes.
Rompre l’isolement : un enjeu très important
Le constat est clair, en France comme en Europe, les hommes présentent donc un risque de suicide largement supérieur à celui des femmes et ce phénomène, bien qu’ayant diminué ces dix dernières années dans certains contextes, reste trop élevé. Agir de manière efficace, c’est ainsi adapter l’intervention à celles et ceux qui sont le plus exposés.
Pour prévenir le suicide, il est essentiel d’agir sur le sentiment de solitude souvent associé à une profonde souffrance morale. Cet enjeu fait déjà l’objet de nombreuses initiatives ciblées, notamment auprès des agriculteurs, particulièrement exposés.
Ce travail d’accompagnement s’inscrit aujourd’hui dans les nouvelles stratégies de prévention qui s’adressent plus largement aux hommes, population à risque accru.
Dans cette perspective, la solidarité et l’entraide apparaissent comme des leviers essentiels pour encourager les hommes à prendre soin d’eux et à exprimer leur détresse.
Plusieurs études confirment d’ailleurs l’efficacité des dispositifs reposant sur l’aide entre pairs, qu’il s’agisse d’amis, de collègues ou de coéquipiers dans la prévention du suicide et le maintien du lien social. Face à cela, une plateforme dédiée a été mise en place en France : Agri’Écoute.
Sources :
- Santé Publique France – Conduites suicidaires en France. Bilan 2023.
- Eurostat - Deaths by suicide in the EU down by 13% in a decade
- Allô Docteurs - Pourquoi les hommes se suicident-ils plus que les femmes ?
- Euro News - Le nombre de décès par suicide en Europe a diminué de 13 % en dix ans
- Sénat - Suicides en agriculture : mieux prévenir, identifier et accompagner les situations de détresse
- Statista - Évolution du taux brut de suicides des hommes et des femmes selon le sexe en France entre 2020 et 2022
- Santé Publique France - Conduites suicidaires en France. Bilan 2024.
- DREES - Suicide : mal-être croissant des jeunes femmes et fin de vie - Penser les conduites suicidaires aux prismes de l’âge et du genre - 6ème rapport / février 2025