Décryptage de la DREES rapport sur l’avortement
En 2023, un peu plus de 89 000 interruptions volontaires de grossesse (IVG) ont mobilisé un professionnel exerçant dans un cabinet libéral, dont une moitié de sages-femmes et l'autre de médecins. Sur les 243 600 IVG enregistrées en France en 2023 (soit 8 600 de plus qu'en 2022), 41% ont été réalisées hors établissement de santé, relève un rapport de la Drees publié ce mercredi 25 septembre*. Depuis l'autorisation des IVG médicamenteuses dans les cabinets libéraux en 2005 et dans les centres de santé en 2009, la part des IVG pratiquées en ville est en constante augmentation.
L'an dernier, 11 488 ont été réalisées dans un centre de santé ou un centre de santé sexuelle et 89 044 dans un cabinet libéral. "La pratique de l’IVG par les sages-femmes libérales, autorisée depuis 2016, s’est beaucoup développée", note la Drees : en 2023, elles ont réalisé 47% des IVG en ville, contre 26% faites par les médecins généralistes et 27% par les gynécologues/gynécologues-obstétriciens.
La Direction de la recherche, des études, de l’évaluation et des statistiques (DREES) publie une étude sur les recours à l’interruption volontaire de grossesse (IVG) en 2022, qui augmentent après deux années de baisse exceptionnelle en 2020 et 2021, liée à la pandémie de Covid-19. Cette publication annuelle fait un état des lieux sur les IVG au regard de l’âge des femmes, de leur département de résidence, du terme de la grossesse, de la méthode utilisée et du lieu de réalisation de l’IVG (établissement de santé ou cabinet libéral).
243 623 IVG recensées en 2023
En 2023, la France a enregistré 243 623 interruptions volontaires de grossesse (IVG), un chiffre qui reflète des tendances marquées à l'échelle nationale. Parmi celles-ci, 16 007 IVG ont concerné des femmes résidant dans les DROM (Départements et Régions d'Outre-Mer), affichant un taux global standardisé presque deux fois supérieur à celui de la France hexagonale (31,2% contre 16,2%). Sur l'ensemble du territoire national, le taux de recours à l'IVG était de 16,8 IVG pour 1 000 femmes âgées de 15 à 49 ans.
La tranche d'âge la plus concernée par l'IVG est celle des femmes de 25 à 29 ans, avec 29,7 IVG pour 1 000 femmes. Concernant les méthodes, 79% des IVG étaient médicamenteuses, dont 48% ont été réalisées en établissements de santé et 46% en cabinets libéraux, les autres se pratiquant dans des centres de santé ou de santé sexuelle (6%).
Une particularité notable est l’impact de la loi du 2 mars 2022 qui a étendu le délai légal pour recourir à l’IVG, passant de 12 à 14 semaines de grossesse. En conséquence, environ 1,5% des IVG totales de 2023 ont eu lieu dans ce cadre élargi, bien que cette proportion soit plus marquée dans les DROM, où le taux d'IVG « tardives » (après 12 semaines) est deux fois plus élevé que dans l’Hexagone.
Quels sont les aspects majeurs de cette hausse ?
L'un des aspects majeurs de cette hausse est l'augmentation des IVG réalisées en dehors des établissements de santé. En 2023, près de 41 % des IVG ont été réalisées dans des cabinets libéraux, des centres de santé ou en ville, une tendance qui se poursuit depuis l'autorisation de ces pratiques en 2005. En outre, la méthode médicamenteuse est désormais la plus courante, représentant 79 % des IVG. Parmi celles-ci, une grande proportion se réalise en ville, avec une répartition géographique marquée : 48 % se font dans des établissements de santé, tandis que 46 % sont pratiquées dans des cabinets privés.
En ce qui concerne les IVG dites "tardives", bien qu'elles restent rares (représentant 9,5 % des IVG hospitalières), elles concernent en partie les femmes pour qui la loi du 2 mars 2022, ayant étendu le délai légal de l'IVG de 12 à 14 semaines, a facilité l'accès à ces procédures.
Ces chiffres soulignent une tendance générale à l'augmentation de la demande, que ce soit en raison d'un manque d'information sur la contraception ou d'autres facteurs sociaux et économiques. Les disparités géographiques, particulièrement entre la métropole et les DROM, restent un défi majeur pour l'accès équitable à l'IVG.
Quels professionnels pour prescrire des IVG?
Les professionnels de ville ayant pratiqué une IVG en 2023 étaient des sages-femmes (1 208), des gynécologues médicaux ou gynéco-obstétriciens (902), des généralistes (1 007) ou des médecins d’autres spécialités (53). Depuis 2020, ce sont 814 soignants libéraux supplémentaires qui ont réalisé cet acte. « La hausse concerne surtout les sages-femmes (+693), alors que la tendance est à la baisse chez les gynécologues médicaux et obstétriciens (-42) », précise la Drees.
Pour expliquer la hausse du nombre d’actes, la présidente du Planning familial, Sarah Durocher, a déploré sur France info qu’il y ait « très peu d'informations autour de la contraception ». Et de rappeler : « Cela fait 10 ans qu'il n'y a pas eu de campagne nationale ». Elle a également cité les dernières données publiées par l’Organisation mondiale de la santé (OMS) sur le recul du port du préservatif chez les jeunes, avec près d’un tiers des adolescents déclarant un dernier rapport sexuel non protégé.
Peut-on se faire prescrire une IVG en téléconsultation ?
Les médecins et les sages-femmes peuvent recourir à la téléconsultation pour réaliser tout ou partie des consultations prévues dans le cadre du parcours d’IVG médicamenteuse. Toutefois, la téléconsultation ne peut être imposée : elle nécessite le consentement libre et éclairé de la patiente.
Lorsque les médicaments nécessaires à une IVG médicamenteuse sont prescrits lors d'une téléconsultation, le professionnel de santé (médecin ou sage-femme) établit l’ordonnance et la transmet, via une messagerie sécurisée ou tout autre moyen garantissant la confidentialité, à la pharmacie choisie au préalable par la patiente. Ces médicaments sont ensuite délivrés à la patiente de manière anonyme et sans frais par cette pharmacie.
Toutefois, MEDADOM ne délivre pas de prescriptions médicales pour une IVG. L’accompagnement se concentre sur l’orientation, le conseil et le soutien, tout en accordant une importance primordiale à la sécurité dans le parcours de soins.
Le saviez-vous ?
En France, l'interruption volontaire de grossesse (IVG) est un droit reconnu par la loi. Depuis 1975, la législation française permet aux femmes d'avoir accès à l'IVG sans condition jusqu'à la 12e semaine de grossesse. Depuis la loi du 2 mars 2022, ce délai a été étendu à 14 semaines de grossesse. L'IVG peut être réalisée soit par voie médicamenteuse, soit chirurgicale, et les soins sont gratuits dans les établissements de santé. Les femmes peuvent choisir d'effectuer une IVG dans un établissement de santé ou en cabinet de ville (centre de santé, cabinet libéral). Les mineures peuvent accéder à l'IVG sans le consentement de leurs parents, et des aides psychosociales et médicales sont disponibles pour accompagner les femmes tout au long de ce processus
L’augmentation du recours à l’IVG s’explique principalement par une amélioration de l’accès aux soins et par l’allongement de la durée légale, qui offrent aux femmes davantage de possibilités pour exercer leur droit à l’interruption volontaire de grossesse. Ces évolutions témoignent d’une volonté de garantir un accompagnement médical plus adapté et inclusif, permettant de mieux répondre aux besoins individuels tout en renforçant les droits fondamentaux liés à la santé sexuelle et reproductive.
Sources :
- EGORA - Sages-femmes, généralistes ou gynécos... Le nombre d'IVG réalisées en ville augmente
- DREES - Le nombre des interruptions volontaires de grossesse augmente en 2022
- Vie publique - Interruption volontaire de grossesse : des IVG en hausse en 2023
- Le Quotidien du Médecin - La hausse des IVG se poursuit en 2023, selon la Drees
- AMELI - Interruption volontaire de grossesse : votre prise en charge
- DREES - Le nombre des interruptions volontaires de grossesse augmente en 2022