C’est bien connu, le système immunitaire est propre à chaque individu et il se trouve influencé par différents facteurs tels que l’âge, le genre, les gènes… Et si le tabagisme avait également un impact à court et long terme sur la réponse immunitaire d’une personne ? C’est l’hypothèse émise par des scientifiques de l’Institut Pasteur à travers une nouvelle étude publiée dans la revue Nature en février dernier. On fait le point.
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Quand il s’agit de se défendre contre les attaques microbiennes, nul n’est à égalité car le système immunitaire n’a pas la même efficacité d’une personne à l’autre.
Dès lors, comment expliquer cette variabilité interindividuelle ? Si l’âge, le sexe et les gènes sont connus pour être des facteurs impactant considérablement la réponse immunitaire, d’autres facteurs auraient également leur part d’influence.
C’est l’hypothèse qu’ont souhaité vérifier des scientifiques de l’Institut Pasteur dans le cadre d’une nouvelle étude s’appuyant sur la cohorte Milieu intérieur.
Depuis 2011, la cohorte Milieu intérieur suit les variations des réponses immunitaires d’un millier de personnes en bonne santé et âgées de 20 à 70 ans.
L’objectif de cette nouvelle étude ? Identifier quels autres facteurs ont le plus d’influence dans la variabilité des réponses immunitaires individuelles.
Après avoir prélevé des échantillons de sang au sein de la cohorte, les chercheurs les ont exposés à un grand nombre de pathogènes (bactéries, virus…) pour savoir comment le système immunitaire de chaque individu allait réagir. Pour cela, les scientifiques ont mesuré les taux de cytokines sécrétées en réponse à l’exposition aux pathogènes.
Les cytokines désignent des protéines fabriquées par les cellules immunitaires pour contribuer au système de défense immunitaire.
Après analyse de 136 variables comme les heures de sommeil, les vaccinations, l’activité physique ou les maladies infantiles, trois variables ressortent comme les plus influentes sur les réponses immunitaires étudiées :
Le virus à CMV (pour cytomégalovirus) désigne un virus appartenant à la famille des Herpès virus. Souvent asymptomatique, il est néanmoins dangereux pour le fœtus.
Ainsi, selon les auteurs de l’étude, ces trois variables pourraient avoir une influence aussi forte sur certaines réponses immunitaires que l'âge, le sexe ou les variables génétiques d’un individu. Les chercheurs se sont donc plus particulièrement intéressés au facteur tabac.
Après étude des données, les chercheurs ont pu démontrer que fumer perturbe à la fois les mécanismes de l’immunité innée et certains mécanismes de l’immunité adaptative. Le tabagisme semble donc avoir deux types de conséquences sur l’immunité :
Si la réponse inflammatoire revient rapidement à la normale après l’arrêt du tabac, l’impact du tabagisme sur l’immunité adaptative persiste quant à lui pendant 10 ou 15 ans. Ce constat révèle ainsi de manière inédite l’influence durable du tabagisme sur le système immunitaire.
Mais concrètement, comment cet impact du tabagisme à long terme sur l’immunité s’exerce-t-il ? C’est ce que les scientifiques ont tenté de décrypter. Et c’est la similarité entre les profils de fumeurs et d’anciens fumeurs qui les a mis sur la piste du rôle potentiel de processus épigénétiques.
Par processus épigénétiques, on entend les modifications de l’ADN susceptibles d’influencer l’expression des gènes et leur utilisation par les cellules.
C’est ainsi que l’équipe de chercheurs a découvert que l’impact durable du tabagisme sur les réponses immunitaires était lié à des modifications chimiques de l’ADN (différences de méthylation) entre les groupes de fumeurs, d’anciens fumeurs et de non-fumeurs. Plus précisément, les modifications de l’ADN dans les groupes de fumeurs et d’anciens fumeurs sont à l’origine d’une modification de l’expression de gènes impliqués dans le métabolisme des cellules immunitaires.
Récemment publiées dans la revue Nature, ces conclusions inédites permettent de mieux appréhender l’influence du tabagisme sur l’immunité des personnes en bonne santé. La prochaine étape consistera certainement à mieux comprendre l’impact du tabagisme sur l’immunité des personnes souffrant de différentes pathologies.
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