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Trisomie 21 et leucémies : comprendre le lien

L'équipe de rédaction de MEDADOM
24/03/25 08:30

La trisomie 21, ou syndrome de Down, est l'anomalie chromosomique la plus courante chez l'humain. Si elle est principalement connue pour provoquer des caractéristiques physiques distinctives et un retard cognitif variable, elle est également associée à un risque accru de développer certaines maladies hématologiques, notamment les leucémies.

 

Mais comment cette anomalie génétique influence-t-elle le développement de ces cancers du sang ? Des recherches récentes ont levé le voile sur les mécanismes sous-jacents à ce lien intrigant. 

 

La trisomie 21 et les anomalies hématologiques

 

Comprendre la trisomie 21 et ses effets sur l'hématopoïèse fœtale 

La trisomie 21 résulte de la présence d'un troisième exemplaire du chromosome 21 dans les cellules. Cette surcharge génétique entraîne une surexpression des gènes situés sur ce chromosome, affectant divers processus biologiques.

Petite fille ayant la trisomie 21 en consultation avec un médecin pour trouver un lien avec la maladie de la leucémie.

Dès la vie fœtale, cette anomalie influence l'hématopoïèse, le processus de formation des cellules sanguines. Des études ont montré que les fœtus trisomiques présentent des altérations significatives dans la production et la différenciation des cellules sanguines.

 

Les anomalies dans la production des cellules sanguines chez les fœtus trisomiques

Les nouveau-nés atteints de trisomie 21 affichent fréquemment des anomalies telles que la polyglobulie (excès de globules rouges) ou la macrocytose (globules rouges de grande taille).

Ces anomalies hématologiques, indépendantes des mutations leucémiques, suggèrent que la trisomie 21 perturbe intrinsèquement le développement normal des cellules sanguines.

De plus, une augmentation des progéniteurs mégacaryocytaires-érythroïdes a été observée dans le foie fœtal des individus trisomiques, indiquant une tendance accrue à produire des cellules de la lignée érythroïde (globules rouges) et mégacaryocytaire (plaquettes).

 

Les mécanismes biologiques liant la trisomie 21 aux leucémies

 

L'impact de la trisomie 21 sur les cellules souches hématopoïétiques 

Les cellules souches hématopoïétiques (CSH) sont à l'origine de toutes les cellules sanguines. Chez les individus trisomiques, ces CSH montrent des altérations à la fois au niveau génétique et épigénétique. Des analyses transcriptomiques à l'échelle unicellulaire ont révélé que les CSH trisomiques sont "préactivées" pour la différenciation, en particulier vers la lignée érythroïde.

Cette prédisposition est le résultat d'une réorganisation des interactions régulatrices dans le génome, affectant l'activité l'expression des gènes clés impliqués dans la différenciation des globules rouges.

 

Le stress oxydatif et les mutations associées  

Un autre facteur essentiel est le stress oxydatif accru observé dans les cellules trisomiques. Ce stress provoque une augmentation de la masse mitochondriale et des niveaux élevés d'espèces réactives de l'oxygène (ROS). Ces conditions favorisent l'apparition de mutations dans des régions régulatrices du génome des CSH.

Notamment, des mutations du facteur de transcription GATA1 ont été identifiées, jouant un rôle majeur dans le développement de préleucémies. Ces mutations, associées à la trisomie 21, créent un environnement propice à l'évolution vers des leucémies aiguës, particulièrement la leucémie myéloïde aiguë chez l'enfant.

 

Quelles sont les avancées scientifiques récentes et perspectives ?  

 

Les découvertes issues de l'analyse multi-omique à l'échelle unicellulaire

Des études récentes ont exploité des technologies avancées, comme la transcriptomique unicellulaire et l'analyse multi-omique, pour cartographier avec précision les altérations cellulaires induites par la trisomie 21.

En analysant plus d'un million de cellules provenant du foie fœtal et de la moelle osseuse, les chercheurs ont mis en évidence que les différences d'expression génique entre les cellules trisomiques et disomiques dépendent fortement du type cellulaire et de l'environnement tissulaire.

Cette approche a permis de dévoiler comment la trisomie 21 restructure le paysage régulatoire des CSH, conduisant à une dérégulation globale de l'expression génique au-delà du seul chromosome 21.

 

Implications pour la prévention et le traitement des leucémies chez les personnes trisomiques 

La compréhension approfondie des mécanismes par lesquels la trisomie 21 prédispose aux leucémies ouvre de nouvelles perspectives pour la prévention et le traitement. La détection précoce des mutations spécifiques, comme celles affectant GATA1, pourrait permettre une surveillance rapprochée des enfants trisomiques à risque.

De plus, cibler les voies impliquées dans le stress oxydatif et la différenciation érythroïde pourrait constituer une stratégie thérapeutique innovante. Par exemple, des interventions visant à moduler l'activité mitochondriale ou à corriger les dysfonctionnements épigénétiques pourraient atténuer le risque de progression vers la leucémie.

 

Le lien entre la trisomie 21 et les leucémies est le fruit d'une interaction complexe entre anomalies génétiques, altérations épigénétiques et influences environnementales au niveau cellulaire.

Les avancées scientifiques récentes ont permis de mieux comprendre comment la surcharge du chromosome 21 conduit à des perturbations dans les cellules souches hématopoïétiques, favorisant ainsi le développement de leucémies.

Ces découvertes offrent un nouvel espoir pour améliorer la prise en charge des personnes atteintes de trisomie 21, en développant des approches préventives et thérapeutiques ciblées. La poursuite des recherches dans ce domaine est essentielle pour offrir aux patients des perspectives de guérison et une meilleure qualité de vie.

 

 

Sources :