Protoxyde d'azote : dangers d'un usage détourné en hausse

Le protoxyde d’azote, communément appelé « gaz hilarant » ou « proto » fait l’objet d’un usage détourné depuis de nombreuses années, surtout dans les cadres festifs. Mais force est de constater qu’il est de plus en plus détourné pour un usage récréatif par une population de plus en plus jeune.
C’est ainsi que des étudiants, des lycéens voire des collégiens en consomment de manière répétée, parfois quotidienne, en quantités importantes et sur de longues périodes. D’où la gravité des cas signalés depuis deux ans. On fait le point.
Qu’est-ce que le protoxyde d’azote ?
Utilisé en médecine anesthésique, le protoxyde d'azote désigne un gaz (molécule : N2O) soumis à la réglementation du médicament. L’industrie l’utilise également en tant que comburant et en tant que gaz de compression dans certains produits alimentaires courants comme les siphons à chantilly par exemple.
Dans ce dernier cas, le protoxyde d’azote répond à la réglementation européenne sur les additifs alimentaires et auxiliaires technologiques et se retrouve en vente libre sous formes de cartouches ou de bonbonnes dans les supermarchés ou sur internet.
Depuis de nombreuses années, les cartouches de siphon pour usage alimentaire font l’objet d’un usage détourné. L’objectif de ce détournement ? Obtenir un effet euphorisant par inhalation du gaz au moyen d’un ballon, après ouverture de la cartouche. S’ensuivent un effet rapide ainsi que des distorsions sensorielles très recherchées par les jeunes.
Le protoxyde d’azote est surnommé « gaz hilarant ».
Si ce détournement concernait jusqu’à présent principalement les jeunes adultes et les étudiants, il intéresse aujourd’hui de plus en plus d’adolescents toujours plus jeunes (lycéens et collégiens), attirés par son prix attractif. Ils en consomment ainsi de manière répétée, parfois quotidienne, en quantités importantes et sur de longues périodes. D’où la gravité des cas signalés et des complications observées depuis deux ans.
Les risques de l’usage détourné du protoxyde d’azote
Des effets toxiques méconnus des consommateurs
Il faut dire que les effets toxiques du protoxyde d’azote sont connus mais bien souvent ignorés des consommateurs qui en détournent l’usage. Parmi les risques identifiés, citons les risques immédiats tels que :
- L’asphyxie par manque d'oxygène.
- La perte de connaissance.
- Le risque de brûlure par le froid du gaz expulsé de la cartouche.
- La perte du réflexe de toux (avec risque de fausse route).
- La désorientation, les vertiges et le risque de chute.
Mais il existe également des risques en cas d'utilisation régulière et/ou à forte dose en raison de l’action du gaz sur le système nerveux central avec de sévères troubles :
- Neurologiques (paresthésies, troubles de la marche et de l’équilibre, convulsions, tremblements).
- Hématologiques.
- Psychiatriques (attaque de panique, délire, confusion, amnésie, agitation, irritabilité, insomnie).
- Cardiaques (tachycardie, hypertension artérielle, bradycardie, douleurs thoraciques).
Notons que ces risques sont majorés par la consommation concomitante d’autres produits comme l’alcool ou la drogue.
Les réflexes à adopter en cas d’intoxication
Les instances sanitaires recommandent ainsi d’adopter les gestes suivants en cas d’intoxication :
- Prévenir les secours (15 ou 112) en cas d’urgence.
- Contacter le Centre antipoison ou le Centre d’addictovigilance en cas de symptômes inquiétants ou inhabituels liés à un usage détourné de protoxyde d’azote.
- Déclarer tout cas grave lié à un abus, une dépendance ou un usage détourné avec le protoxyde d’azote sur le portail officiel des signalements.
Si une personne pratiquant un usage détourné du protoxyde d’azote rencontre du mal à contrôler ou à arrêter sa consommation, il conviendra de l’orienter vers un médecin ou une structure spécialisée dans la prise en charge des addictions.
Un cadre règlementaire protecteur
Dans ce contexte de recrudescence d’un usage détourné du protoxyde d’azote, une loi visant à prévenir les usages dangereux du protoxyde d'azote a été adoptée depuis le 1er juin 2021. Il s’agit de la loi n° 2021-695 qui encadre plus sévèrement la commercialisation du protoxyde d’azote en :
- Interdisant de vendre ou d’offrir du protoxyde d’azote à toute personne mineure quel que soit le conditionnement, dans tous les commerces, les lieux publics et sur internet. La violation de cette interdiction est punie de 3 750 € d'amende.
- Interdisant de vendre ou d’offrir du protoxyde d’azote, y compris aux personnes majeures, dans les débits de boissons (bars, discothèques, soirées étudiantes, etc.) et les débits de tabac.
- Interdisant de vendre et de distribuer tout produit spécifiquement destiné à faciliter l'extraction de protoxyde d'azote, comme les « crakers » et les ballons.
- Incitant les commerçants à exiger une preuve de la majorité des clients achetant des cartouches de protoxyde d’azote.
- Obligeant les sites de commerce électronique à spécifier l'interdiction de la vente de protoxyde d’azote aux mineurs sur les pages permettant de procéder à un achat en ligne, quel que soit le conditionnement du produit.
Par ailleurs, rappelons qu’inciter une personne mineure à faire un usage détourné d'un produit de consommation courante pour en obtenir des effets psychoactifs représente un délit puni de 15 000 € d'amende. Un décret est enfin en préparation pour fixer les modalités de mention sur tous les conditionnements de la dangerosité du protoxyde d’azote en cas d’inhalation.
Gageons que ce cadre règlementaire plus sévère permettra de mieux protéger les jeunes consommateurs contre les effets toxiques du protoxyde d’azote !
Sources :
-
MILDECA (Mission interministérielle de lutte contre les drogues et les conduites addictives) - L’usage détourné du protoxyde d’azote, une pratique à risques de plus en plus répandue