Est-il possible de perdre du poids sans régime ?
Perdre du poids est un sujet central dans la vie de nombreux Français. Faire un régime, faire plus de sport… cela ne marche souvent qu’un temps. Il existe pourtant d’autres méthodes, sans frustration, pour revenir à son poids d’équilibre : l’alimentation intuitive et l’approche bio-psycho-sensorielle.
Faut-il nécessairement faire un régime pour perdre du poids ?
Pourquoi perd-t-on du poids ?
Les variations du poids (perte, prise ou maintien) dépendent de la balance énergétique. En d’autres termes, du rapport entre les calories ingérées et les calories dépensées (au repos et par l’activité physique).
Pour perdre du poids, il suffirait donc d’apporter moins de calories que l’on en dépense. En théorie, ce déficit calorique peut être créé par deux méthodes :
- Manger moins (faire un régime).
- Bouger plus (faire du sport).
Et ce sont ces recommandations qui sont présentées comme uniques solutions pour perdre du poids. Toutefois, la réalité est bien différente et la perte de poids difficile en suivant ces préconisations.
Quels sont les risques des régimes ?
En 2010, l’ANSES (Agence nationale de sécurité sanitaire de l'alimentation, de l'environnement et du travail) a publié un rapport sur les risques liés aux régimes amaigrissants.
De nombreux régimes pour perdre du poids ont été évalués, qu’il s’agisse de restriction calorique (1500kcal, voire parfois beaucoup plus sévère, à moins de 800kcal quand les besoins d’une femme moyenne sont à 2000kcal) ou non (avec restriction du choix des aliments). Les résultats montraient de nombreuses conséquences délétères, pour n’en citer que quelques une :
- Diminution de la masse osseuse ;
- Troubles digestifs (constipation) ;
- Troubles du cycle menstruel ;
- Dépression et perte d’estime de soi ;
- Déficits d’apports en certains nutriments, selon les régimes ;
- Perte de masse musculaire.
Perdre du poids en faisant un régime n’est donc pas sans risque.
De plus, à 1 an, 80% des personnes reprennent le poids perdu, et ce chiffre augmente à plus long-terme. On assiste aussi souvent à un « rebond pondéral », une prise de poids supérieure au poids perdu.
Une autre étude a quant à elle mis en évidence une reprise du poids perdu chez 94% des individus après 2 ans.
Lors de la reprise pondérale, on reprend d’ailleurs préférentiellement de la graisse, ce qui n’améliore pas le problème.
Perdre du poids avec une alimentation équilibrée : est-ce possible ?
Qu’est-ce qu’une alimentation équilibrée ?
Une alimentation équilibrée est une alimentation variée, suivant les recommandations du PNNS (Plan National Nutrition Santé), à savoir :
- Augmenter la consommation de fruits et légumes, de légumes secs.
- Favoriser le fait-maison.
- Consommer davantage de féculents complets, varier les huiles alimentaires (olive, colza, noix…).
- Réduire la consommation d’aliments gras, sucrés, salés, ultra-transformés, de viande.
- Consommer moins de boissons sucrées…
Faut-il manger équilibré pour perdre du poids ?
Comme on l’a vu, la perte de poids dépend d’un déficit calorique. Une alimentation équilibrée ne permet donc pas nécessairement de perdre du poids si les calories ingérées restent supérieures au besoin. Au même titre, il est possible de perdre du poids en ne respectant pas les recommandations du PNNS.
L’équilibre alimentaire tel que défini par le PNNS a avant tout des objectifs de santé et non de poids. De plus, les besoins diffèrent d’une personne à une autre et cela, seul notre corps le sait.
Peut-on perdre du poids juste en faisant plus de sport ?
On peut alors légitimement penser que, si un régime ne permet pas de perdre du poids sur le long-terme, il suffit de faire plus de sport pour perdre du poids. Cependant, dans le cadre d’un comportement alimentaire régulé, si on dépense plus d’énergie, le corps va chercher à compenser ce déficit en augmentant l’appétit pour augmenter les apports.
En effet, l’objectif du corps est de maintenir ses caractéristiques physiologiques à une valeur de consigne, c’est ce que l’on nomme « homéostasie ». Dans ce contexte, on appelle la valeur de consigne « poids d’équilibre », et le corps tente de l’atteindre ou de la conserver grâce à de nombreux systèmes de régulation.
Faire du sport pour perdre du poids est donc difficile à tenir sur la durée. Cela ne signifie pour autant pas qu’il ne faille pas pratiquer une activité physique. Le sport a des impacts positifs, autant sur la santé physique que mentale.
Si les régimes et le sport ne fonctionnent pas sur le long-terme, cela signifie-t-il alors qu’il n’y a rien à faire pour perdre du poids ? Heureusement que non, et l’alimentation intuitive peut aider à perdre du poids sans régime, afin de revenir à son poids d'équilibre.
En quoi consiste l’alimentation intuitive ?
Comment l’alimentation intuitive fonctionne-t-elle ?
L’alimentation intuitive est une approche différente de la culture des régimes amaigrissants. Décrite par deux américaines et reconnue depuis 1995, elle trouve son pendant français dans l’approche bio-psycho-sensorielle du Groupe de Réflexion sur l’Obésité et le Surpoids (G.R.O.S) en France depuis 1998.
L’alimentation intuitive repose sur la capacité du corps à se maintenir à une constante, et dans ce cas précis, le poids. Pour cela, le corps dispose de moyens de régulation :
- La faim : quand les réserves s’épuisent et que le poids risque de diminuer (ce qui représente un danger pour l’organisme), qui se traduit par une sensation physique.
- Les envies de manger spécifiques : pour apporter les nutriments nécessaires au corps ou réguler une émotion, qui n’a pas d’expression physique.
- La satiété : l’absence de faim, signifiant qu’il n’est pas nécessaire de manger.
- Le rassasiement : la satisfaction d’une envie de manger.
L’alimentation intuitive propose donc de suivre ces signaux, afin de répondre aux besoins réels du corps et revenir à son poids d’équilibre.
Cependant, il est difficile d’entendre et de satisfaire ces besoins lorsque notre alimentation est dictée par des signaux externes : recommandations pour bien manger, régimes déjà effectués qui laissent des marques, croyances alimentaires…
Les 10 principes de l’alimentation intuitive
L’alimentation intuitive est une démarche qui repose donc sur 10 principes fondamentaux afin de faire fi des croyances :
1. Rejeter la culture des diètes (la mentalité des régimes amaigrissants)
La culture des régimes donne de faux espoirs de perdre du poids rapidement, facilement et de manière permanente. Or, il n’existe aucun régime permettant cela.
Lorsque le régime échoue, invariablement, on se sent nul car on a abandonné le régime. Pourtant, c’est le principe même du régime qui fait que l’on ne peut pas le tenir sur le long-terme, puisqu’on lutte contre les besoins physiologiques de son corps.
Tant que l’on garde l’espoir de perdre du poids grâce à un régime, on peut difficilement pratiquer l’alimentation intuitive.
2. Être à l’écoute de sa faim
Un principe clé de l’alimentation intuitive est de respecter les besoins exprimés par le corps, qu’ils concernent les calories ou les glucides. En luttant contre sa faim, on prend le risque de déclencher des prises alimentaires bien plus importantes que nos besoins initiaux.
Cette écoute permet également de reconstruire la confiance que l’on a, en soi même et dans les aliments.
3. Faire la paix avec les aliments
Il s’agit ici de comprendre réellement qu’aucun aliment n’est bon ou mauvais et de pouvoir ainsi manger tous les aliments que l’on souhaite, tout en perdant du poids si l’on est au-dessus de son poids d’équilibre.
Tant qu’un aliment reste interdit dans notre esprit, il y a un risque de compulsion alimentaire par peur du manque, même si on se l’autorise ponctuellement.
4. Se battre contre le gendarme alimentaire
Dans notre tête, il y a un gendarme alimentaire qui nous dit que tel aliment est bon ou mauvais, basé sur ce que nous a appris la culture des régimes. L’alimentation intuitive nécessite que ce gendarme soit mis en sourdine. En effet, tant que celui-ci est présent, il n’est pas possible d’écouter ce que dit vraiment le corps. L’insécurité liée aux aliments détourne de l’attention nécessaire pour manger selon nos besoins.
5. Manger avec plaisir
La satisfaction et le plaisir doivent être au cœur de notre alimentation, et plus largement de notre existence. Ce dont notre corps a besoin génère une envie, et la satisfaction de cette envie génère du plaisir.
L’alimentation intuitive vise à rétablir ce lien-là : manger avec plaisir signifie donc répondre aux besoins du corps.
6. Reconnaître sa satiété et son rassasiement
Observer les sensations alimentaires (faim, satiété, plaisir…), la plénitude gastrique, le sentiment de satisfaction (qui décline avec le rassasiement) pour s’arrêter au bon moment est essentiel pour perdre du poids si l’on est au-dessus de son poids d’équilibre.
7. Vivre ses émotions avec bienveillance
Pour pratiquer l’alimentation intuitive, il est essentiel de reconnaître que la restriction alimentaire (qu’elle soit physique ou mentale) peut déclencher des pertes de contrôle. Ces dernières peuvent ressembler à de l’alimentation émotionnelle, mais ne sont en fait que l’expression de la frustration du corps.
L’alimentation peut permettre de réguler des émotions, bien qu’elle ne permette évidemment pas de régler les problèmes. Se réconforter avec de la nourriture n’empêche d’ailleurs pas de perdre du poids. En mangeant avec attention, plaisir et sécurité dans ces moments-là, on permet de diminuer l’intensité de l’émotion vécue.
8. Accepter et respecter son corps
Le poids d’équilibre est individuel, programmé et impossible à faire diminuer. Au même titre qu’une personne faisant une pointure en 39 ne peut espérer rentrer dans une pointure 37, notre corps est programmé pour une certaine morphologie.
Il est donc possible de perdre du poids avec l’alimentation intuitive lorsque l’on est au-dessus de notre poids d’équilibre. Mais vouloir lutter contre notre poids d’équilibre est illusoire et source de souffrance. L’alimentation intuitive rappelle que tous les corps méritent de la dignité.
9. Se mettre en mouvement
Être actif, en fonction de ses capacités physiques, permet une amélioration de l’humeur et permet de se reconnecter à son corps.
Il n’est pas nécessaire de courir un marathon si on ne le souhaite pas, des activités douces (marche, yoga…) permettent déjà cela.
10. Prendre soin de sa santé et être à l’écoute de ses papilles gustatives
Se rappeler qu’il n’y a pas besoin de manger parfaitement ni de faire un 36 pour être en bonne santé est essentiel pour pratiquer l’alimentation intuitive.
Il ne s’agit alors pas de viser la perfection, mais l’équilibre, notamment au vu de la santé mentale : mieux vaut manger ce qui nous fait du bien plutôt que de frustrer son corps.
Pas de médecin disponible et une affection ponctuelle ?
Propos écrits par Amanda Huguet-Millot, Diététicienne-Nutritionniste et Ingénieure en Alimentation & Santé
Sources :
- ANSES – Actualisation des repères du PNNS : élaboration des références nutritionnelles (2016)
- ANSES – Régimes amaigrissants : des pratiques à risque
- ANSES – L’illusion perdue des régimes amaigrissants
- ANSES – Evaluation des risques liés aux pratiques alimentaires d’amaigrissement (2010)
- Evelyn Tribole & Elyse Resch. Intuitive Eating. 4ème édition (2020)
- Formation du G.R.O.S sur le modèle bio-psycho-sensoriel (2022)
- Groupe de réflexion sur l’obésité et le surpoids (GROS) – Pourquoi cette approche ?
- Haute autorité de santé (HAS) - Obésité de l’adulte : prise en charge de 2 e et 3 e niveaux (2022)
- Jean-Philippe Zermati. Osez manger : libérez-vous du contrôle. Editions Odile Jacob (2019)
- Jean-Philippe Zermati. Maigrir sans régime. Editions Odile Jacob (2011)
- Phelan S, O Hill J, Dibello J.R, Wing R.R. Recovery from relapse among successful weight maintainer. Am J clin Nutr, 2003, 78, 1079-84.
- Santé Publique France – Manger équilibré, ça veut dire quoi et comment y arriver ?