La lumière du jour en prévention des troubles du sommeil liés à l’âge
Tout le monde le sait, rien de tel qu’une bonne nuit de sommeil pour un lendemain réussi ! Sauf que dans les faits, c’est parfois compliqué. Car les troubles du sommeil sont courants : ils touchent un tiers des adultes français et leur prévalence augmente avec l’âge.
Dès lors, comment expliquer leur survenue ? À ce jour, la communauté scientifique peine encore à décrypter les mécanismes en cause. Mais selon une récente étude, les troubles du sommeil pourraient être la conséquence d’une dérégulation de l’horloge biologique liée à une baisse de perception de la lumière avec l’âge. Zoom sur les conclusions de ces travaux inédits.
Horloge biologique et sécrétion de l’hormone du sommeil
Le bon fonctionnement de l’organisme dépend de l’horloge biologique qui y joue un rôle essentiel. Synchronisée grâce à la lumière du jour, elle impose au corps un rythme « circadien ». Il s’agit d’un cycle de 24 heures durant lequel différents mécanismes biologiques et physiologiques se répètent. Parmi ces mécanismes, citons la sécrétion de l’hormone du sommeil, appelée mélatonine. Sa fabrication augmente en fin de journée pour favoriser l’endormissement et chute avant le réveil.
Des études scientifiques ont déjà démontré que la sécrétion de mélatonine par le cerveau était bloquée par la lumière. Mais jusqu’à présent, peu d’études se sont intéressées aux mécanismes biologiques impliqués dans les troubles du sommeil liés à l’âge. Ces troubles sont d’ailleurs courants : un tiers des personnes âgées de plus de 65 ans consomme des somnifères de façon chronique d’après la Haute autorité de Santé.
Une équipe de scientifiques français du Centre de recherche en neurosciences de Lyon s’est donc penchée sur le sujet.
Son objectif ? Tenter de savoir si les troubles du sommeil chez les personnes âgées sont liés à une mauvaise perception de la lumière et à une désynchronisation de leur horloge biologique.
Un changement de perception de la lumière avec l’âge
Effets de la lumière sur la sécrétion de mélatonine
Pour vérifier cette hypothèse, les scientifiques ont étudié les effets de la lumière sur la sécrétion de mélatonine. Pour cela, ils ont exposé deux groupes de volontaires à 9 lumières de couleurs différentes. Le premier groupe était constitué de volontaires jeunes (moyenne d’âge de 25 ans) et le second groupe de volontaires plus âgés (moyenne d’âge de 59 ans). Cette exposition s’est faite pendant une heure et en pleine nuit, ce qui correspond au moment où le corps est censé produire le plus de mélatonine.
Ces 9 lumières de couleurs différentes ont été sélectionnées car elles correspondent à 9 longueurs d’ondes distinctes.
Les chercheurs ont alors constaté que la lumière bleue était très efficace pour bloquer la production de mélatonine chez les personnes jeunes. Ils ont ensuite pu observer une différence entre les deux groupes quant aux photorécepteurs oculaires impliqués. Par exemple, pour une exposition à la lumière bleue :
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Chez les jeunes participants, la mélanopsine était le seul photorécepteur impliqué dans la suppression de la mélatonine.
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À l’inverse, chez les participants plus âgés, d’autres photorécepteurs semblaient être impliqués, comme les cônes S et M.
La mélanopsine désigne un photorécepteur présent dans la rétine et qui joue un rôle important dans le contrôle de la fabrication de mélatonine. Très sensible à la lumière, la mélanopsine permet de réguler le rythme circadien. En cas d’exposition à la lumière, la mélanopsine booste ainsi la suppression de mélatonine.
Évolution de la perception et des besoins en lumière avec l’âge
D’après ces résultats publiés dans le Journal of Pineal Research, il semblerait que le vieillissement entraîne une moindre implication de la mélanopsine dans la perception de la lumière. Ce qui influence bien évidemment la sécrétion de l’hormone du sommeil.
En revanche, la rétine des personnes âgées parviendrait à compenser cette perte par une augmentation de la sensibilité à d’autres photorécepteurs qui joueraient à leur tour un rôle dans la suppression de la mélatonine. Ce nouveau mécanisme d’adaptation permettrait ainsi aux personnes plus âgées de rester sensibles à la lumière malgré le brunissement du cristallin de l’œil lors du vieillissement. Pour les auteurs de l’étude, il y a donc bien une évolution avec l’âge de la perception et des besoins en lumière.
Plus de lumière naturelle pour prévenir les troubles du sommeil liés à l’âge ?
Pour éviter l’apparition de troubles du sommeil, les scientifiques encouragent donc les personnes âgées à davantage s’exposer à la lumière du jour plutôt qu’à la lumière artificielle. En effet, pour pouvoir synchroniser leur horloge biologique sur une journée de 24 heures, les personnes âgées doivent s’exposer à une lumière plus riche en longueurs d’onde que la simple lumière bleue (comme celle des éclairages à LED) qui suffit aux personnes plus jeunes.
L’étape suivante pour l’équipe de chercheurs ? Évaluer la quantité et la qualité de lumière nécessaires à chaque individu, et identifier le meilleur moment de la journée pour s’exposer à la lumière et éviter la survenue de troubles du sommeil. En clair, proposer aux personnes plus âgées des programmes de photothérapie et/ou luminothérapie personnalisés.
Sources :