Santé décomplexée

Pourquoi manger des aliments fermentés ?

Rédigé par Amanda Huguet-Millot | 19/04/24 06:30

Choucroute, pain, vin, bière, saucisson, fromage… de nombreux aliments clés de notre gastronomie reposent sur la fermentation.

Initialement utilisée pour conserver les aliments plus longtemps, la fermentation présente de nombreux atouts pour la santé, ainsi que gustatifs !

Kombucha, kéfir, légumes lactofermentés ont ainsi le vent en poupe : découvrez comment ils sont fabriqués et leurs bienfaits sur notre santé.

 

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Qu’est-ce qu’un aliment fermenté ?

 

Définition de la fermentation

 

D’après le Larousse, la fermentation est la « transformation que subissent certaines matières organiques sous l'action d'enzymes sécrétées par des micro-organismes ».

En d’autres termes, la fermentation est un processus au cours duquel les micro-organismes (bactéries, levures ou moisissures) transforment les sucres présents dans les aliments (glucose, lactose…) en d’autres molécules (alcool, acide lactique…), tout en créant de nouveaux composés, parfois bénéfiques pour la santé.

Lors de la fermentation, les aliments changent au niveau organoleptique (goût, odeur, texture…) et leur composition nutritionnelle évolue.

 

 

Pourquoi fait-on fermenter les aliments ?

 

La fermentation est avant tout un processus de conservation. Elle permet ainsi d’augmenter la durée de vie des produits, et de consommer certains produits, même hors-saison.

En effet, la fermentation consiste à faire se développer un type particulier de microorganismes qui, en occupant le terrain, empêchent l’implantation de microorganismes dangereux pour la santé (pathogènes).

De plus, certains microorganismes produisent des molécules inhibant la croissance des bactéries pathogènes. Ces composés dits « bactériocines » incluent notamment les acides produits lors de la fermentation (acide lactique, acide acétique, etc.) et l’alcool.

 

Mais la fermentation permet également :

  • Le développement de certaines caractéristiques organoleptiques ;
  • La production d’alcool ;
  • D’améliorer la digestibilité de certains produits et l’assimilation de certains nutriments

 

Il existe en effet plusieurs types de fermentations utilisées dans l’alimentation :

  • La fermentation lactique ou lacto-fermentation : permet la conservation d’aliments crus sur des longues périodes, grâce aux bactéries lactiques. Par exemple, en présence de sel et en l’absence d’oxygène, les bactéries lactiques se développent en se nourrissant des sucres des légumes et produisent de l’acide lactique, donnant un goût légèrement acide aux légumes. La fermentation lactique permet également l’acidification du lait, changeant sa texture et créant le yaourt.

 

  • La fermentation alcoolique : dans la bière, le vin ou encore le cidre, les levures transforment les sucres en alcool et en CO2, rendant la boisson pétillante et alcoolisée.

 

  • La fermentation acétique : les bactéries acétiques convertissent l’alcool en acide acétique, donnant un goût aigre. C’est le procédé utilisé pour fabriquer le vinaigre.

                                                        

Par exemple, fabriquer du pain requiert également une fermentation :

  • Alcoolique : dans le cas d’un pain à la levure de boulanger.
  • Lactique : dans le cas d’un pain au levain.

 

Le goût du pain dépend ainsi du type de microorganismes utilisés : le goût d’un pain au levain sera plus acidulé.

 

D’autres types de fermentations plus spécifiques existent dans certaines parties du monde, comme la fermentation aux graines de koji (un champignon nommé Aspergillus Oryzae cultivé sur des céréales), qui permet de produire du miso et du tempeh (soja fermenté). Grâce à cette fermentation, les protéines sont digérées par les microorganismes, facilitant leur digestion.

 

 

Quels sont les différents aliments fermentés ?

 

 

En fonction des types de fermentations et des cultures, de nombreux aliments fermentés sont présents sur le marché :

  • Produits dérivés du lait : yaourts, fromages frais ou affinés, crème fraîche, lait ribot ;
  • Produits à base de soja : miso, tempeh, sauce soja…
  • Légumes : choucroute, kimchi (légumes fermentés au piment), betterave lactofermentée…
  • Pain ;
  • Boissons : kéfir, kombucha… 
  • Alcool : vin, cidre, bière…
  • Vinaigre.

 

 

Pourquoi manger des aliments fermentés ?

 

La fermentation pour le développement des arômes

 

La fermentation permet de développer les arômes des aliments :

 

Les aliments fermentés permettent donc d’ouvrir une nouvelle palette de goûts !

 

Au niveau texture, la fermentation permet aussi de faire évoluer l’aliment :

  • Le lait se fige pour créer un yaourt.
  • Le chou s’assouplit en devenant choucroute…

 

La lactofermentation ouvre donc un nouveau champ des possibles en cuisine, tout en étant économique, car elle permet de conserver des aliments qui auraient pu finir à la poubelle.

 

 

Les bienfaits des aliments fermentés pour la santé

 

Les probiotiques, ces bactéries qui nous veulent du bien

 

Les « bonnes » bactéries (mais aussi levures) présentes dans les aliments fermentés, aussi appelées « probiotiques », possèdent de nombreux atouts :

 

  • Sur le système immunitaire : en renforçant la barrière intestinale et en favorisant la production de cellules immunitaire.

 

  • Sur la digestion et l’absorption des nutriments : grâce aux enzymes contenues dans certains aliments fermentés, la digestion est facilitée et l’absorption des nutriments (protéines, vitamines, minéraux…) peut être optimisée. De plus, certains nutriments difficiles à digérer par une partie de la population, comme le lactose, peuvent être moins présents, voire disparaître totalement au cours de la fermentation. Enfin, les aliments lactofermentés peuvent également aider à la production d'acide chlorhydrique, permettant une meilleure digestion.

 

Les probiotiques contenus dans les aliments fermentés pourraient même avoir un rôle de prévention dans le cadre de plusieurs cancers (peau, sein, prostate et côlon).

 

Les atouts nutritionnels des aliments fermentés

 

La fermentation est également génératrice de composés nutritionnels bénéfiques pour la santé :

  • Des précurseurs de la vitamine C, lors de la fermentation du chou en choucroute par exemple.
  • Des prébiotiques : des fibres alimentaires permettant de nourrir les bonnes bactéries, tout en les rendant plus digestes.
  • De la vitamine B12, grâce à certaines bactéries propioniques.
  • Des acides gras à chaîne courte, qui pourraient aider à prévenir les cancers colorectaux.

 

Ainsi, les aliments fermentés pourraient également :

  • Réduire les risques de maladies cardiovasculaires.
  • Améliorer la tolérance au glucose et réduire la résistance à l’insuline chez les patients prédiabétiques.
  • Abaisser le cholestérol et la glycémie chez des personnes en surpoids ou obèses.
  • Réduire la toxicité de certains composés indésirables, comme les composés cyanogènes (précurseurs du cyanure) dans le manioc notamment, voire de certains allergènes.

 

 

Comment fabriquer ses propres légumes lactofermentés ?

 

À la maison, réaliser des aliments lactofermentés n’est pas si compliqué !

Pour faire fermenter les légumes, il suffit de suivre quelques étapes simples :

1. Découpez les légumes

 

Vous pouvez les rincer à l’eau courante, mais évitez de les laver trop en profondeur car les bactéries nécessaires à la fermentation se trouvent sur leur peau.

 

2. Ajoutez du sel

 

Environ 2%, voire 3 à 4% pour conserver les légumes plus longtemps.

Le salage peut être fait en immergeant les légumes dans une saumure (eau salée à au moins 1%, donc minimum 10g par litre d’eau, pour éviter le développement des mauvaises souches de microorganismes) ou à sec, pour faire dégorger les légumes (la quantité de sel se calcule alors sur le poids des légumes).

 

3. Conservez les légumes salés hermétiquement

 

Pour limiter toute entrée d’oxygène, afin de favoriser une fermentation avec les bonnes bactéries lactiques et empêcher la prolifération des souches indésirables, dont les moisissures.

 

4. Laissez fermenter à température ambiante

 

Les « bonnes » bactéries se développent en transformant les sucres en acide lactique. La température idéale de fermentation se situe entre 15 et 30°C.

Attention ! La fermentation produit du gaz carbonique (CO2) qu’il faut évacuer, sous peine d’augmentation de la pression et de risque d’explosion du contenant.

Des pots à leviers existent, permettant de se dégazer tous seuls. Sinon, il est possible de dévisser légèrement le couvercle du pot d’un quart de tour la 1ère semaine, avant de mettre au réfrigérateur.

 

5. Savourez !


Au bout d’un certain temps, la fermentation s’arrête d’elle-même car la teneur en acide lactique atteint son seuil maximal. Même si la conservation se prolonge, la fermentation s’arrête et les légumes sont prêts à être consommés.

 

 

Quels sont les inconvénients des aliments fermentés ?

 

Si les aliments lactofermentés ont été préparés correctement (taux de sel suffisant notamment), le risque d’intoxication est extrêmement faible.

 

Toutefois, la consommation d’aliments fermentés doit être raisonnée, car un excès de consommation pourrait entraîner :

  • Des cancers de l’œsophage : c’est en tout cas ce qui a été observé chez les gros consommateurs de sauce de poisson.
  • Des réactions allergiques et inflammatoires suite à la consommation de poisson fermenté, à cause de la teneur en histamine.
  • Des risques accrus d’hypertension artérielle, à cause de la teneur en sel des légumes lactofermentés.
  • Des ballonnements.
  • Des interactions médicamenteuses: tels que les anticoagulants, les médicaments anti-diabétiques et contre l’hypertension artérielle.

 

Si ces risques sont surtout présents en cas de consommation excessive, il peut être judicieux de consulter votre médecin traitant en cas de problème de santé préexistant.

Dans tous les cas, il est recommandé d’en consommer avec modération, comme pour tout aliment, et des les intégrer progressivement dans son alimentation.

 

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Propos écrits par Amanda Huguet-Millot, Diététicienne-Nutritionniste et Ingénieure en Alimentation & Santé

 

 

Sources :

  • Agence nationale de sécurité sanitaire de l'alimentation, de l'environnement et du travail (ANSES) – Ciqual : Table de composition nutritionnelle des aliments
  • Aliments fermentés, aliments santé, Gallimard, collection Alternatives, 2016.
  • Dairy products and its association with incidence of cardiovascular disease: The Malmö diet and cancer cohort, PubMed 2011.
  • Fermented kimchi reduces body weight and improves metabolic parameters in overweight and obese patients, Kim EK et al, Elsevier, 2011.
  • Food Fermentation: Netsanet Shiferaw Terefe, CSIRO Food and Nutrition, Australie, 2016.
  • Health-promoting microbes in traditional Vietnamese fermented foods, Nguyen La Anh, Food Science and Human Wellness, 2015
  • INRAE - Le potentiel insoupçonné des aliments fermentés
  • INRAE - Les 4 atouts des aliments fermentés
  • La fourchette – Les atouts saveur des aliments fermentés
  • L’Union - Pourquoi manger des aliments fermentés ?
  • Marco ML, Sanders ME, Gänzle M The International Scientific Association for Probiotics and Prebiotics (ISAPP) consensus statement on fermented foods. Nat Rev Gastroenterol Hepatol. 2021;18(3):196-208.
  • Nutritional and antioxidant properties of tempeh flour from common bean, Reyes- Bastidas M et al, Food Science &Technology International, 2010.
  • Properties and benefits of kefir - a review, S M John et al, Songklanakarin Journal Science Technology, Thaïlande, 2015
  • Sanders ME, Merenstein D, Merrifield CA, Hutkins R. – Probiotics for human use – Publié dans Nutrition Bulletin 2018,43:212–225.
  • Sciences & Avenir - Toute la richesse des aliments fermentés
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